Le Groupe Démocrate et Libéral du PE se mobilise contre la Hongrie (article 7 du Traité sur l’UE)
En réponse aux mesures répressives prises par le gouvernement hongrois pour endiguer l’afflux de réfugiés, le Président du Groupe Démocrate et Libéral du Parlement européen, Guy Verhofstadt (ancien Premier ministre belge) explique dans un entretien à « Libération » paru le 25 septembre 2015 qu’il entame une action contre cet Etat en demandant au Parlement européen de lancer la procédure préventive prévue par l’article 7 du Traité sur l’UE. C’est l’occasion de mieux comprendre les mécanismes de suspension d’un Etat membre contenus dans les textes européens.
Les textes de l’UE ne permettent pas d’expulser un Etat de force, mais l’article 7 du Traité sur l’UE prévoit deux procédures : la première peut être entamée soit par la Commission, soit par un tiers des Etats membres en proposant au Conseil européen des chefs d’Etat et de gouvernement de
« constater » qu’un état viole de façon « grave et persistante » les valeurs européennes (respect de la dignité humaine, de la liberté, de la démocratie, de l’égalité, de l’état de droit , des droits de l’homme et des minorités). Ce constat ne peut être fait qu’à l’unanimité (moins l’Etat mis en cause) et le Parlement européen doit l’approuver. Ensuite, le Conseil des ministres (instance moins haute que le Conseil européen) « peut » décider de sanctionner, à la majorité qualifiée, l’Etat en cause en suspendant « certains des droits découlant de l’application des traités… y compris les droits de vote au sein du conseil. »
Cette première procédure très lourde a un caractère répressif puisqu’elle suppose qu’un Etat a déjà commis une violation persistante des valeurs européennes et qu’on applique des sanctions. A la suite de la crise autrichienne de 1999 (coalition de partis conservateurs et d’extrême droite), on a rajouté un volet préventif à l’article 7 permettant de réagir à un « risque clair de violation grave par un Etat membre des valeurs ». Selon cette deuxième procédure un peu plus légère, un tiers des Etats membres mais aussi le Parlement européen peuvent demander au Conseil des ministres (et non le Conseil européen) de constater ce risque à la majorité des quatre cinquièmes et d’émettre des recommandations à l’Etat fautif. C’est alors seulement, si celui-ci ne les suit pas, que le volet répressif est enclenché. C’est le deuxième volet préventif que Guy Verhofstadt veut activer contre la Hongrie.
Au Parlement européen, le premier ministre hongrois Viktor Orban reste pour l’instant protégé par le groupe parlementaire PPE (pourtant dominé par les chrétiens-démocrates allemands) auquel son parti adhère.
Verhofstadt compare la gestion de la crise des réfugiés à celle de l’euro en constatant que « Schengen comme la zone euro souffre d’une absence de gouvernance. On a créé une monnaie unique et un espace sans frontière intérieure, mais sans donner les moyens de le gouverner. » Pour lui
« il est impossible d’avoir des frontières extérieures communes avec des contrôles nationaux, car cela revient à repousser les problèmes vers d’autres pays. Il faut un contrôle commun des frontières extérieures avec des policiers et des douaniers détachés dans une structure européenne…De même, un système commun d’asile doit être mis en place afin que le statut de réfugié soit accordé selon les mêmes critères partout en Europe ». Son groupe demande également à la Commission de proposer un pacte entre états membres avec des indicateurs concernant les valeurs et principes européens et un système de surveillance : « il faut que nous puissions dire ce qui ne va pas dans tel ou tel pays avant que la situation ne devienne irréversible : état dans les prisons, corruption, liberté de la presse, indépendance des juges, etc . Un tel pacte permettrait d’éviter que ce soit les Etats qui décident, car il n’est pas facile de sanctionner son voisin ».
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