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La course à la compétitivité ou Panurge au pouvoir

Notes d'analyses et opinions

La course à la compétitivité ou Panurge au pouvoir

Messagepar scripta manent » Sam 22 Déc 2012 01:54

Dans un entretien accordé au Financial Times après le dernier Sommet européen, Angela Merkel a mis les points sur les i quant à l’exigence de compétitivité : pour survivre au défi de la « globalisation », l’Europe devra poursuivre résolument dans la voie de l’austérité et des réformes structurelles, à commencer par celle du marché du travail. « Défi », « survivre », le ton est résolument dramatique et le prix à payer est annoncé : « Merkel warns on cost of welfare ». Quelques jours après cet entretien, les statistiques sur le développement de la pauvreté en Allemagne, depuis la réforme du « marché » du travail des années 2003 à 2005, ont confirmé que, pour une fraction croissante de la population, celle qui paie l’addition, c’est bien, en effet, de « survivre » qu’il s’agit.

Cette « mondialisation » (globalisation pour les anglo-saxons) qui nous défie et qu’il est question de payer de notre bien-être (« welfare ») revêt dans la formulation d’Angela Merkel comme un statut d’intangibilité. Qu’en est-il exactement ?
Intéressons-nous d’abord au « libre-échange ». Souvent perçu comme la composante principale de la mondialisation, c’est lui qui nous confronte à l’exigence de compétitivité puisqu’il implique une ouverture inconditionnelle des frontières aux mouvements de marchandises. La théorisation des débats sur le libre-échange remonte aux débuts de l’ère industrielle. Dans la pratique, il est assez vite apparu qu’il y avait abus de langage car, en fait de liberté, les puissances de l’époque ont surtout pris celle d’imposer leurs produits manufacturés au reste du monde, notamment à leurs colonies, et d’en piller les ressources naturelles. Mauvais début et curieuse conception de « l’échange ». Notons d’ailleurs que les anglo-saxons parlent de « free-trade » (libre commerce) et non de libre-échange, ce qui a le mérite d’éliminer la présomption d’équilibre véhiculée par le concept d’échange.
Amorcée après la guerre de 39-45, avec la signature du GATT (accord multilatéral sur le commerce international), l’évolution vers un « ordre mondial » privilégiant, voire imposant, le libre-échange, a trouvé son couronnement en 1995 avec la création de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce).
Dans l’intervalle, une autre mutation d’importance était intervenue, avec la mise en pratique d’une version extrémiste du libéralisme, prônant une large dérégulation/libéralisation dans les domaines économiques et financiers et une réduction au strict minimum du rôle de l’Etat.
En quelques décennies, le libre-échange, qui était resté une exception, est ainsi devenu une règle internationale, sous-ensemble d’un nouvel ordre mondial, la « globalisation » ou mondialisation ultralibérale, activement soutenue depuis les années 80 par le FMI et la Banque mondiale.

Ce n’était pas une fatalité ni une évolution inéluctable : en 1991 encore, dans son ouvrage « Capitalisme contre capitalisme », Michel Albert, ancien Commissaire général au Plan et Président des AGF écrivait : « Le communisme s’est effondré. Le capitalisme triomphe (…). Il redevient dangereux (…). Notre avenir se joue désormais entre cette victoire et ce danger. (…) Le débat oppose deux modèles de capitalisme : le modèle « néo-américain », fondé sur la réussite individuelle, le profit financier à court terme (…) et le modèle « rhénan » (…) qui valorise la réussite collective, le consensus, le souci du long terme. (…) Tout notre avenir en dépend. »
Désormais, la messe est dite : la mondialisation ultralibérale domine dans les faits et dans les têtes, et la finance est au pouvoir.

Est-ce une réussite ? Laissons George Soros - orfèvre en la matière puisqu’il figure en bonne place dans le palmarès mondial des grands fonds spéculatifs - nous donner la réponse (« On Globalization » - 2002) : « Le commerce international et les marchés financiers globaux (…) ne sont pas en mesure de satisfaire un certain nombre de besoins sociaux. Parmi ceux-ci, on trouve le maintien de la paix, la réduction de la pauvreté, la protection de l’environnement, l’amélioration des conditions de travail ou le respect des droits de l’homme : ce que l’on appelle, en somme, le bien commun ». On ne saurait mieux dire. Et c’était avant la crise actuelle !

A défaut de bien commun, la « mondialisation ultralibérale » est-elle au moins une réussite du strict point de vue économique ? Il est permis d’en douter.
Ses prétentions à l’autorégulation ont été démenties par la succession et l’ampleur croissante des crises qu’elle a provoquées. Le développement des fonds spéculatifs et de l’incontrôlable finance occulte (« shadow banking ») qui, selon un rapport de novembre 2012 du FSB (Financial Stability Board), détient des actifs d’un montant supérieur au PIB mondial, continue à se nourrir de produits « innovants », véritables cocktails Molotov de la finance, généralement sans la moindre utilité pour l’économie réelle. Quant à la durée moyenne de détention d’une action, qui se comptait en années jusque dans les années 80, elle se compte désormais en secondes.

La croissance elle-même n’a pas été au rendez-vous : selon les statistiques de l’OCDE, si le PIB mondial a triplé en volume entre 1950 et 1975, alors que le protectionnisme dominait encore largement, il n’a que doublé entre 1975 et 2000, en pleine période de montée en puissance de la dérégulation. En France, les taux de croissance annuelle, qui s’inscrivaient dans une fourchette de 3 à 7 % entre 1945 et 1975, n’ont plus été que de 0 à 3 % depuis lors. Par contre, l’écart de revenu entre les plus riches et les plus pauvres est allé croissant et l’industrie du luxe, encore aujourd’hui, ne s’est jamais si bien portée…

C'est dans ce contexte général que l’on nous exhorte à être compétitifs.
Pour être dans le camp des « vainqueurs » il faut, nous dit-on, agir sur le « coût du travail ». Face à la menace permanente de la délocalisation ou de la sous-traitance à moindre coût, il faut paupériser ses propres travailleurs et contraindre la consommation intérieure, au bénéfice de l’exportation. Jusqu’où ces enchères à la baisse nous mèneront-elles ? Car il y aura toujours des troupes fraîches, dans de nouvelles zones « émergentes », pour alimenter le chaudron du libre-échange.
Notre salut, nous dit-on aussi, pourrait venir du « haut de gamme ». Aimable plaisanterie, sur fond de morgue « occidentale » : imagine-t-on vraiment que les « émergents » vont durablement se contenter de fabriquer des jouets et de la marchandise de bazar - ils n’en sont déjà plus là - en nous laissant le soin de les pourvoir en machines-outils ? Pendant qu’en Europe on se gargarise avec cette potion euphorisante, la Chine prévoit un triplement de ses exportations de machines-outils et équipements de transport d’ici 2020 et la Corée du sud, la Thaïlande et l’Indonésie affichent elles aussi de vastes ambitions dans ce domaine.
La course à la compétitivité, c’est Panurge au pouvoir.

Pour couronner le tout, le modèle de société auquel aboutit cette course folle est ubuesque. Le libre-échange sans condition ne génère pas de la complémentarité et de la coopération, il génère de la redondance et de l’affrontement : des salades de fruits frais chinoises dans les supermarchés québécois, du granit des Indes et des ardoises du Brésil en Bretagne … Il ne génère pas de la qualité et de la valeur d’usage, il génère du « low cost » et de l’incitation à consommer tout et n’importe quoi, pourvu que cela nourrisse le Moloch.
Cette compétition se développe en un temps où jamais l’humanité n’a disposé de capacités de nuisance aussi dévastatrices. Ce n’est pas la « mondialisation », telle qu’elle est aujourd’hui pratiquée, qui nous préservera des conflits, des émeutes du désespoir et des catastrophes environnementales. Il est beaucoup plus à craindre qu’elle renforce les tensions et les risques qu’il n’est à espérer qu’elle les réduise.

Ravageuse aux plans social et environnemental, médiocre et chaotique au plan économique, la globalisation continue cependant à rallier les suffrages de la majeure partie des analystes et des dirigeants.
On peut y voir deux raisons. D’une part, la simplicité rassurante du dogme ultralibéral, propice à une foi naïve dont il semble difficile de se départir. Milton Friedman, n’a-t-il pas déclaré : « Ce qui est extraordinaire avec la science économique, c'est que toutes ses lois tiennent réellement en une page » ? D’autre part, un tel degré d’avancement du processus de dérégulation que même ceux dont la foi commence à vaciller ne voient plus trop la possibilité de faire machine arrière.
On peut les comprendre, car la libéralisation à outrance a été opérée avec l’aval et souvent l’appui d’un pouvoir politique fasciné à ce point par les « idées nouvelles » qu’il a fini par abandonner des pans entiers de ses prérogatives (contrôle des mouvements de marchandises et de capitaux), voire de sa souveraineté (pouvoir monétaire). La cohérence des territoires d’exercice des pouvoirs politique, économique et financier a ainsi volé en éclats, mettant le premier sous tutelle des deux autres.

Là est le véritable « défi de la globalisation », car que peut vouloir dire la démocratie lorsque les gouvernants se délestent des moyens de contrôler le modèle de société ?

Deux solutions antagonistes sont évoquées pour l’indispensable remise en concordance des pouvoirs et des territoires : le « gouvernement mondial » et le repli nationaliste.
Ni l'une ni l'autre ne sont crédibles.

Lors du dîner de clôture de la « World policy conference » à Cannes, le 8 décembre 2012, Pascal Lamy, infatigable promoteur du libre-échange en tant que Directeur général de l’OMC, s’est exprimé comme suit : « Je participe, comme quelques-uns ici ce soir, aux travaux du G20 depuis ses débuts. Et je fais un rêve. Et si (…) les dirigeants nationaux (…) exposaient à leurs collègues quelles sont leurs conceptions du développement, de la justice sociale, de la souveraineté, de la soutenabilité environnementale ? (…) ? Et s’ils débattaient d’un nouveau modèle de croissance qui économiserait davantage les ressources rares, celles de la nature, et moins les ressources humaines, abondantes ? Je sais, je rêve. Plus sérieusement, je suis parvenu, après toutes ces années de fréquentation des lieux de la gouvernance globale, à la conviction qu’il y manque pour avancer, un soubassement de valeurs communes de nature à porter une ambition partagée de civilisation. S’attaquer à construire une telle plate-forme représente sans doute un défi considérable. (…) Je crois néanmoins qu’emprunter cette face nord de la gouvernance globale est devenu incontournable. »
Magnifique discours, mais Pascal Lamy a raison : il rêve.
Le jour même où il s’exprimait ainsi, la Conférence de Doha sur le changement climatique, déjà fort peu représentative du concert des nations, se terminait sur un simulacre d’accord. Quelques jours auparavant, la Banque mondiale avait produit un remarquable rapport d’étude sur le changement climatique. Dans sa préface, Jim Yong Kim, son président, évoquait des perspectives « dévastatrices » pour le siècle en cours et l’urgence d’un retour à la raison. Fort bien mais alors il faudra réformer en priorité la Banque mondiale car elle a été jusqu’à ce jour un ardent propagateur de la dérégulation et l’on n’en finirait plus de citer les projets « dévastateurs » qu’elle a financés.
De façon générale, les institutions internationales sont le lieu des grands discours et des grands principes mais elles sont paralysées par l’affrontement entre les intérêts discordants des pays membres. Aucune instance internationale n’est aujourd’hui en mesure d’exercer un pouvoir politique à l’échelle mondiale et les catastrophes évoquées par la Banque mondiale auront largement le temps de survenir avant que cela change.

La tentation peut être grande dans ces conditions de se replier sur les frontières nationales mais ce serait méconnaître les nouveaux rapports de force. Aucun des Etats européens, pris isolément, n’a désormais la capacité de peser puissamment sur la scène mondiale. La France ne représente plus que 1 % de la population et 4,5 % du PIB mondial, contre 10 % il y a un peu plus d’un siècle.
Seule une puissante fédération d’Etats pourrait développer avec succès une stratégie économique et sociale alternative qui, sans remettre en cause le principe de la libre entreprise, remettrait l’initiative économique au service de la société. Bien loin de se couper du monde, cette fédération pourrait entretenir des échanges fructueux et équitables tant avec les pays développés ou émergents qu’avec les pays pauvres. L’exemplarité de cette démarche pourrait encourager d’autres peuples à s’engager dans la même voie.

Certaines grandes organisations internationales appellent désormais l’attention sur les risques sociaux et économiques qui résultent de la pression sur les bas salaires et du développement des inégalités, dans tous les pays. C’est le cas de l’OIT (Organisation internationale du travail) depuis plusieurs années. Dans son rapport 2012, elle recommande de « refuser de laisser la finance donner le ton pour l’élaboration des politiques. » C’est aussi le cas pour l’OCDE lorsqu’elle écrit, début 2012 : « Le creusement des inégalités est l’un des principaux risques pesant sur notre prospérité et notre sécurité futures ».

Infléchir ces tendances, réformer les conditions d’accès au travail, soulager la funeste pression qui s’exerce sur les bas salaires … tel est, pour l’Union européenne, le véritable « défi de la globalisation », qui ne consiste pas à se soumettre à ses règles mais, bien au contraire, à les remettre en question. Cela suppose d’avoir en mains tous les leviers de conduite de la politique économique et sociale et, en particulier, un meilleur contrôle de l’ensemble des flux économiques et financiers sur le territoire européen.

En bref, il serait temps que la puissance publique retrouve et le moral, et sa dignité, et ses prérogatives. Si l’abandon du libre-échange inconditionnel s’appelle « protectionnisme », alors il faut le revendiquer et c’est au niveau européen qu’il faut agir.
Disant cela, nous avons conscience de partir de loin puisque les ministres du commerce européens viennent de donner mandat à la Commission pour ouvrir des négociations avec le Japon en vue d’un accord de libre-échange ! Par ailleurs, souvenons-nous de la réaction de Karel de Gucht, Commissaire européen au commerce, aux déclarations d’Arnaud Montebourg évoquant, en octobre 2012, l’éventualité de mesures protectionnistes : « S'il tente de le faire, il va trouver Bruxelles et le Commissaire à la concurrence Joaquin Almunia sur sa route ! » Il faut croire que, pour Monsieur Karel de Gucht, le développement du commerce est un objectif qui se suffit à lui-même et prime sur toute autre considération.

Paradoxalement, la crise actuelle offre à l’Europe une chance historique de se réaffirmer sur la scène mondiale en prenant l’initiative du sursaut. Détricoter l’écheveau que l’on a laissé se développer ne se fera évidemment pas sans difficultés, mais la fuite en avant en annonce aussi beaucoup, et de bien pires. Tant qu’à rencontrer des difficultés, autant que ce soit en poursuivant des objectifs que l’on a choisis plutôt qu’en se laissant porter par un flot dont on ne maîtrise pas le cours.
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Re: La course à la compétitivité ou Panurge au pouvoir

Messagepar scripta manent » Mer 09 Jan 2013 12:50

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Re: La course à la compétitivité ou Panurge au pouvoir

Messagepar causonsen » Mer 09 Jan 2013 19:43

Un article du 27 novembre 2012, paru sur le blog de Paul Jorion, sous le titre " Compétitivité et coût du travail : le mauvais débat ", apporte des éléments chiffrés intéressants au débat sur la compétitivité.
Il comporte des graphiques particulièrement parlants.
En synthèse il en résulte que :
- les cotisations sociales pèsent moins lourd que les dividendes totaux distribués dans les comptes des sociétés non financières ; précisons toutefois qu'il n'en va plus de même si l'on prend ensuite en compte l'incidence de la fiscalité ;
- de 1993 à 2011, la part de la masse salariale (salaires + cotisations sociales) dans la valeur ajoutée est restée à peu près stable autour de 67-68 % ;
- sur la même période, la part des dividences distribués, dans la valeur ajoutée, a plus que doublé, passant de 7,5 à 21 % ;
- c'est l'investissement qui a fait les frais de cette augmentation des dividendes ;
- il en a été de même, ces dernières années, de l'impôt sur les sociétés, dont le rendement a ainsi été pénalisé de 16 milliards d'euros.
Voila qui conduit à jeter un regard nouveau sur la dégradation de la compétitivité française et sur le sempiternel argument du " coût du travail ".
Ajoutons que l'auteur évoque aussi l'incompétence de certains patrons " parachutés " dans nos grandes entreprises ...

Pour accéder à l'article : http://www.pauljorion.com/blog/?p=44121
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Re: La course à la compétitivité ou Panurge au pouvoir

Messagepar KERHUNE » Lun 14 Jan 2013 20:26

Je fais suite aux articles de Scripta Manent et de Paul JORION et loin de moi de distribuer des bons points, j'ai trouvé ces deux contributions passionnantes. J'y rajoute donc modestement mon grain de sel.....

Tout d'abord au niveau de l'évolution sur la période étudiée par Paul JORION.

Il est malhonnête de la part de nombreux experts et dirigeants ne ne pas relever que la compétitivité n'est pas liée au seul coût du travail mais qu'elle dépend aussi de l'intensité capitalistique du processus de production et du savoir faire technique et commercial. Ce que relève fort bien les graphiques présentés pour la partie investissements. Par contre, qu'on le veuille ou non, l'augmentation des dividendes va de pair avec les attentes des investisseurs. Les taux de rentabilité de leurs placements dans les pays émergents ont pu être élevés en partie parce que les investissements se sont réorientés vers eux et que les États-Unis et l'Europe se sont endettés, pour soutenir la consommation de leurs ressortissants et donc les exportations des premiers. On a toujours soutenu que la stagnation des pays en voie de développement tenait largement au manque de capitaux. Cette situation s'est retournée et le vieux continent Europe est devenu moins intéressant.
Insuffisance des investissements et hausse des dividendes en Europe sont donc en ligne avec ce système mondial et cette évolution était programmée. La carence de l'Europe et des états a été de se refuser à toute analyse prospective qui montrait bien qu'on allait dans le mur pour une grande part de leurs concitoyens.

Ensuite, au niveau de la situation actuelle.

Même si l'on peut largement expliquer la baisse de productivité par l'absence d'investissements, il reste que tout pays qui ne présente pas un avantage compétitif en terme de savoir-faire (formation, innovation) ou de structure industrielle et dont la monnaie est gérée de l'extérieur (euro fort) se trouve alors confronté défavorablement, au niveau de ses prix et donc de ses coûts, à la concurrence internationale. La France en est là, je le crains. Le renouveau de l'Allemagne sur cette première décennie du nouveau siècle n'est pas dû qu'à la modération salariale (à quel prix !...comme relevé par Scripta Manent) mais elle y a participé sans conteste tandis que l'endettement des autres pays européens a stimulé ses exportations. Cette situation n'est malheureusement plus transposable car avec une croissance, qui restera faible au niveau européen pour longtemps, il n'y aura pas grand monde pour acheter les biens des pays qui auront fait baisser leurs salaires ou leurs charges que ce soit en interne ou à l'exportation.

Cette baisse inconsidérée des salaires ou des charges sociales ne fera que précipiter les pays en crise en Europe vers une récession sans retour, comme au Japon, ou vers un équilibre de sous-emploi et une perte des repères et de lien social dont politiques et économistes auraient bien tort de sous-estimer les effets.
En outre, quel devrait être le niveau de cette austérité pour attirer de nouveau les investisseurs en dehors de toute incitation ? Nul ne le sait, et, quand on entend le mea-culpa récent du FMI qui avoue que ses experts se sont trompés de modèle dans un facteur 3 entre la rigueur et la récession, on ne peut qu'être réservé sur leurs conclusions. Olli REHN, le commissaire européen aux affaires économiques vient de déclarer "j'attends avec impatience que le gouvernement français agisse de manière franche et déterminée pour réformer le marché du travail et améliorer la compétitivité du pays" (BOURSORAMA). L'assimilation trompeuse est donc toujours présente entre compétitivité, productivité et seul coût du travail et les tenants de la méthode continuent à enfoncer le clou......

Quel est le but du gouvernement des hommes, qu'il soit maintenant local (national) ou européen? Est-ce de favoriser une oligarchie en s'alignant comme des ovins devant leur auge au nom de ce principe à la mode qu'est la mondialisation-globalisation? ou de construire un avenir pour les populations?

Les derniers développements européens ont bien marqué le souhait de l'Europe continentale de rester unie mais pour quoi faire ? On se souvient dans ces conditions de l'attitude de Charles de Gaulle trépignant sur son fauteuil en fustigeant les tenants d'une Europe par principe; alors que les citoyens souhaitent aujourd'hui se mobiliser non pas seulement au nom d'un seul principe mais pour un grand mouvement à dimension humaine.
Demander au club européen des "triple A" de laisser filer leurs prix et leurs salaires pour redonner de la compétitivité aux autres n'est pas réaliste. Ils ne vont pas lâcher la proie pour l'ombre. Les autres pays doivent se réformer mais on ne pourra pas éviter de se poser les vraies questions:
-Combien de temps se donne-t-on pour ces réformes?
-Comment l'Europe peut-elle accompagner ces réformes financièrement pour éviter que les européens ne désespèrent des institutions européennes et ne les associent à leur désespoir ?
-Comment relancer la solidarité nécessaire entre riches et pauvres avec des contreparties d'engagements fermes des pays aidés ?
-A quand un modèle et une perspective pour l'Europe au niveau social, fiscal et politique même si cela doit nous obliger à nous remettre en cause ? (Sur le modèle des derniers accords patronat-syndicat en France qui marquent peut-être une ère nouvelle: celle des compromis plutôt que des luttes stériles ?)
-à quand un vrai budget européen pour mettre cela en œuvre ?

Ceux qui croient qu'il suffit de faire baisser le coût du travail pour répondre à ces interrogations sont ou bien très stupides ou très machiavéliques !
Les retournements de conjoncture ont toujours à voir avec un retour de la confiance. Comment croit-on pouvoir relancer une économie avec une perspective aussi médiocre que celle de faire baisser le coût du travail ? Tout cela manque singulièrement de souffle !
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Re: La course à la compétitivité ou Panurge au pouvoir

Messagepar voxpop » Mer 05 Fév 2014 20:50

" L’obsession de la compétitivité a-t-elle tué l’Europe ? " Tel est le titre d'un article d'Ecolinks (collectif d'économistes), publié sur La vie des idées le 28 janvier 2014.

La thèse des auteurs est la suivante :
" Pour répondre à la crise des dettes souveraines et aux graves déséquilibres dont souffre l’Union européenne, les politiques mises en place invoquent la notion de "compétitivité". Mais cette notion et les prescriptions qu’elle implique ne conviennent pas à la situation européenne qu’elles risquent d’aggraver. "

Et ils concluent leur article par les recommandations suivantes :
" D’autres politiques coordonnées au niveau européen devraient guider les efforts nationaux avec pour objectif de favoriser un retour rapide à la croissance :
- Une hausse des salaires plus prononcée en Allemagne que dans les pays européens déficitaires, combinée à une inflation transitoirement plus élevée dans l’ensemble de la zone euro, favoriserait le rééquilibrage des balances de transactions courantes sans passer par des politiques déflationnistes dans les pays de la périphérie. En clair, les salaires ne doivent pas baisser en France, pas plus qu’en Espagne ou en Grèce. L’inflation pour l’ensemble de la zone euro, actuellement très en-deçà de la cible de 2%, devrait être fixée transitoirement à 3% ou 4%, afin de permettre aux salaires d’augmenter plus rapidement en Allemagne notamment.
- Une politique budgétaire plus lâche, se matérialisant principalement par un report dans le temps des ajustements budgétaires, permettrait de soutenir la demande à la fois au centre et dans la périphérie. Un engagement clair des gouvernements pourrait être pris afin d’ajuster les efforts budgétaires en fonction du cycle. Une inflation transitoirement plus élevée permettrait là encore d’alléger le poids de la dette.
- Des orientations claires en matière d’investissements publics visant à soutenir la croissance à long terme devraient être débattues entre gouvernements européens, en collaboration avec la Commission Européenne et le Parlement Européen, afin de soutenir le financement de projets d’avenir notamment dans les économies européennes les plus fragilisées par la crise.
Si l’obsession de la compétitivité n’a pas encore tué l’Europe, il est urgent de reconnaître l’échec des politiques déflationnistes mises en œuvre par les gouvernements européens jusqu’à présent. Une réorientation de ces politiques est nécessaire, et doit permettre de soutenir la demande et l’investissement dans le centre et la périphérie de la zone euro.
"

Pour prendre connaissance de l'ensemble de l'article : La vie des idées / Ecolinks

Pour accéder au site d'Ecolinks : http://www.ecolinks.fr
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Re: La course à la compétitivité ou Panurge au pouvoir

Messagepar scripta manent » Mer 26 Mar 2014 11:29

" Ile-de-France Décroissance " nous a contactés, le 3 janvier 2013, en ces termes : " Comme suite à votre article sur Agoravox : " La course à la compétitivité ou Panurge au pouvoir ", nous avons des convergences d'analyse. "

Et nous a communiqué le texte ci-après :

Une révolution fiscale au service d’une société et de modes de vie soutenables : est-il encore temps ? Comment ?

Alors que les objecteurs de croissance sont hostiles au keynésianisme (mais ils n’aiment pas plus le libéralisme et sa loi du marché), examiner si l’outil fiscal pourrait aider à mener la « conversion écologique » que nous appelons de nos vœux semble paradoxal et demande des explications.

La fiscalité est en effet un outil au service de l’Etat, or nous ne souhaitons pas accorder à l’Etat, en tant que pouvoir coercitif, un rôle trop important.

Néanmoins, la fiscalité est synonyme de « révolution » et de démocratie, c’est au nom du contrôle de la dépense publique que les Britanniques ont obtenu des droits démocratiques.
De même, c’est notamment à cause de l’absence de contrôle de la dépense publique que la Révolution française a eu lieu.

Toutefois, nous ne sommes plus au XVIIème, ni au XVIIIème siècle et l’enjeu n’est plus de « faire la révolution » contre un monarque tout puissant comme le firent la bourgeoisie anglaise et plus tard la française. Il s’agit d’accompagner au mieux un changement de Civilisation de façon à ce que la communauté humaine puisse vivre en harmonie avec la Nature.
Ce qui signifie que nos propositions ne pourront être que des propositions de transition, des propositions pour impulser et/ou aider à la transition/conversion vers une civilisation qui ne s’appuierait plus sur l’encouragement à la croissance du PIB (et ce faisant à la lente mais irrémédiable destruction du propre habitat de ses membres et même de ces derniers).
Ces propositions seront arrachées par des minorités à un parti de gouvernement suite à une stratégie de basculement. Il ne suffira pas de se rassembler autour d’organisations qui maintiennent l’illusion de stratégies de renversement par des majorités institutionnelles : nous défendons une stratégie de basculement par des minorités, en convergence avec les mouvements sociaux, pour influencer des majorités. C'est cela la révolution « lente », celle qui constitue notre perspective politique.
Conscients dès lors de la contradiction que peut constituer la présente démarche, nous effectuons cependant les propositions qui suivent par esprit de responsabilité vis-à-vis de nos concitoyen-ne-s et souci de « réalisme » compte tenu de l’urgence que commande la gravité de la situation[1].

1/ Relocalisation écologique :
1.1 Consommation : substitution aux TVA, TIPP, TGAP, … d’une taxe écologique sur la consommation[2], assise sur le prix des marchandises/services et dont le taux dépendrait de l’intensité de ceux-ci en ressources non renouvelables et en déchets[3] (pondération entre 0 et 1 appliquée à un taux plafond « dissuasif ») ; l’instauration d’une telle taxe serait encore plus pertinente dans l’ensemble de l’UE.
Ainsi, les produits/services les plus « vertueux » (naturels, locaux, artisanaux, non énergivores, …), « pondérés » à 0 seraient taxés au taux minimum, 0%, ce qui combiné à la mesure suivante 1.2, pourrait diminuer leur prix (en cible d’environ 25%) ;
A l’opposé, les produits/services les moins « vertueux », pondérés à 1 (au maximum), seraient taxés au taux plafond retenu (avec 500% comme plafond, leur prix serait multiplié par 5 environ[4]).
.....> permettrait, outre la relocalisation et l’incitation aux comportements écologiquement soutenables, le rétablissement d’une taxation effective des multinationales (fût-ce-t-elle indirecte), en particulier des géants de l’informatique qui localisent une grande partie de leurs bénéfices dans les paradis fiscaux.
1.2 Crédit d’impôt ou subvention pour les entreprises qui recyclent avec les critères ci-dessous (1.3),
1.3 En ce qui concerne le secteur productif : mise en œuvre d’une taxation écologique tenant compte de l’intensité Ressources Non Renouvelables et Déchets[5]et s’inspirant de l’ « écologie industrielle », mais de façon critique afin d’encourager la mise en réseau des entreprises, leur relocalisation et la recherche de produits ayant une intensité RNR et D la plus basse.
2/ Arrêt des politiques natalistes :
- suppression du quotient conjugal (lequel constitue une rupture d’égalité devant l’impôt  anticonstitutionnel) neutralité de la fiscalité par rapport aux choix de vie
- suppression du quotient familial et octroi d’allocations familiales dégressives à compter du 3ème enfant.
Ces mesures « écologiques » devraient être complétées par les mesures suivantes, par souci de justice et de simplicité :
3/ simplicité : retenue à la source de l’impôt sur le revenu
4/ justice/lisibilité/redistribution : rétablissement de laprogressivité de l’impôt sur le revenu en élargissant la base d’imposition (fusion IR et CSG et suppression de la plupart des niches fiscales[6]) combiné à un barème de taux plus échelonnés (l’idée étant en outre de tendre vers un revenu maximum accepté dont le montant serait démocratiquement fixé)
5/ justice : taxation identique des différents types de revenu : du travail, du capital, sociaux (dont allocations familiales ; à défaut, prise en compte de celles-ci dans le RFR et pour le taux moyen d’imposition), …
6/ justice/progressivité : suppression de la discrimination envers les résidents consistant à ne pas tenir compte pour l’imposition des non-résidents de l’ensemble de leurs facultés contributives pour la détermination de leur taux moyen d’imposition à l’IR et l’ISF.
7/ harmonisation fiscale en Europe (en particulier taxe écologique sur la consommation et imposition des bénéfices des entreprises, cotisations sociales, coopération bien plus étroite qu’actuellement concernant l’imposition des multinationales et leur transparence, réforme en profondeur de la PAC), adaptation des règles OCDE à l’économie numérique (notamment adaptation de la règle de l’établissement stable, prix de transfert), fermeture des paradis fiscaux (à tout le moins non reconnaissance des écrans que constituent les structures enregistrées dans ceux-ci).
Ces mesures, qui favoriseront en premier lieu la recherche du plein-emploi – afin de remédier à la misère d’une partie croissante de la population et au chômage générés désormais par ce modèle de société prisonnier de et aveuglé par cette inepte recherche de la croissance du PIB -, devraient en outre favoriser la relocalisation systématique des activités utiles et être accompagnées d’une réflexion sur les produits, les besoins et les finalités (tout-pesticide, produits chimiques[7], construction d’autoroutes, d’aéroports, chauffages électriques, finalités du travail, etc), d’un arrêt des activités les plus nuisibles (nucléaire), et d’une reconversion progressive des activités parasitaires comme la publicité ou le conseil en fraude fiscale.

Annexe : de la Décroissance, ou a-croissance

C’est non seulement la religion de la croissance qui est en crise, mais le retour de la croissance du PIB lui-même est devenue improbable.

En ces temps de débat d’orientation énergétique dont l’issue est connue d’avance (part belle au nucléaire), de tenue d’un Grenelle bis ou de location des services de Nicolas Hulot pour donner une caution écologique à ce gouvernement PS-EELV, de loi de finances et de rapport sur la « compétitivité », les mesurettes annoncées sont loin d’être à la hauteur de la gravité de la situation[8], qui nécessiterait des mesures radicales !, de même que son actuelle intransigeance sur le projet d’Ayraultport de Notre-Dame-des-Landes confirme le peu de considération de ce gouvernement envers le dialogue citoyen et les enjeux écologiques.
Lors des dernières élections législatives, nous, les objecteurs de croissance, avons promu la sobriété et le qualitatif, dénoncé ce mode de vie à crédit sur notre environnement et tenté d’alerter sur la gravité de la situation à venir et le probable non-retour de la croissance du PIB, mais nous avons été ignorés, voire caricaturés et moqués, au profit des vendeurs de « croissance », marchands d’illusion du « toujours plus »[9].
Les politiciens de droite hier et ceux de gauche aujourd’hui centrent toute leur action – au mieux par un aveuglement coupable ou une confondante naïveté – sur le retour de la « croissance » (du PIB), tel Zorro pour nous sauver de la méchante récession (on parle maintenant de « croissance nulle » ou « croissance négative » pour mieux nier la réalité)[10].
Or, comme cela peut être constaté sur les graphiques ci-dessous, l’évolution du PIB français a une histoire et une tendance lourde, celle-ci est orientée vers un seul destin : la récession. Une fois la couche moyenne installée, de maigres lois « environnementales » votées, il est très difficile de faire marche arrière et ainsi il ne reste plus que la récession ou le « traitement de choc » pour espérer maintenir un minimum de croissance. Cette situation ne peut que déboucher sur la barbarie, car peu à peu apparaissent les limites physiques et géologiques à la croissance.

Car la source de nos problèmes est si intégrée à notre Civilisation qu’elle en obstrue quasiment toute possibilité de changement. Faute d’une remise en question lucide et radicale, les maintes dispositions prises pour parer aux revers d’un système entièrement fondé sur la recherche de la « croissance économique »[11] sont au mieux aussi efficaces que de creuser un trou pour en combler un autre.
Ce modèle de société productiviste, qui a perdu tout sens des limites, basé sur la prédation par l’Etre humain du reste de la Nature et sur une foi aveugle envers la technique, est aujourd’hui confronté à la finitude de la Planète et à l’épuisement de ses ressources ; ce modèle est même devenu dangereux pour l’Humanité tout entière.
Un enfant de cinq ans parvient à réaliser qu’il ne peut faire plus de châteaux de sable qu’il ne possède de sable dans son bac, et pourtant très peu d’économistes ou de politiciens sont encore aujourd’hui prêts à admettre que notre continuelle quête de croissance matérielle devait se confronter un jour ou l’autre aux limites des capacités de notre Planète.
Nous ne sommes pas, de ce fait, confrontés à une crise passagère, mais à une situation durable et globale, et surtout totalement inconnue, à la fois anthropologique, « civilisationnelle » et « géologique », une situation à laquelle les êtres humains n’ont jamais été confrontés.
Pour la 1ère fois dans l’histoire de l’Humanité en effet, nous atteignons le plafond de verre de nos ressources (matières premières, terres agricoles, terre constructibles, alimentations), et nous produisons tellement de déchets qu’ils mettent en péril la biosphère ; or, la plupart de nos intellectuels et experts, qui nous inondent d’analyses fausses et désuettes, sans parler des membres de notre nomenklatura (énarques, …), bardés de leurs connaissances livresques et soucieux de la sauvegarde des privilèges dont ils jouissent, formatés[12], conformés à des schémas dépassés, ont du mal à réaliser tout cela. Ils n’ont rien lu sur ce type de crise, ne savent pas l’imaginer, ni la concevoir, et, pour paraphraser Jared Diamond à propos des élites de l’Ile de Pâques et de celles de la civilisation Maya, n’auraient pas les moyens intellectuels d’expertiser l’effondrement en cours.
Tout cela pourrait n’être regardé que comme des élucubrations d’écologistes radicaux et illuminés, de « Khmers verts ». On rappellera cependant que nous rejetions déjà en 1972 85% des capacités d’absorption de la biosphère, 100% en 1986, et 150% aujourd’hui, le rythme s’accélérant ; et par ailleurs que la banquise du pôle Nord a fondu cet été au-delà des prévisions les plus pessimistes ...

En 1914, personne n’avait compris Sarajevo, une petite crise diplomatique qui allait se résoudre ; personne n’avait prévu l’extension à la planète d’une guerre longue et meurtrière.
En 2008, la crise des subprimes n’a été comprise que comme une crise économique passagère d’origine financière (et non pas comme due à la hausse du prix des matières premières et au franchissement du pic de pétrole). Malgré la récession larvée dans de nombreux pays occidentaux et les symptômes que constituent les révolutions arabes (par ailleurs salutaires), très peu de personnes ne semblent encore voir venir la dépression mondiale et les profonds bouleversements qui en découleront, et que ce marasme dans lequel nous nous enfonçons un peu plus chaque jour est en fait d’origine anthropologique, civilisationnel et géologique.
Aussi, nous en appelons à une véritable révolution culturelle voire civilisationnelle, à une redéfinition des notions de richesse et de pauvreté, des besoins, et portons un projet de société d’« abondance frugale », ou pour le dire comme Tim Jackson, de « prospérité sans croissance », de relocalisation, ralentissement, de plus de bien-être, de liens sociaux, de dignité, de coopération, de simplicité, de sens, d’harmonie, d’épanouissement et de « bien-vivre » pour tous, en particulier pour les plus modestes[13], et entendons :
- ne pas cautionner, et au contraire « Résister », à cette course à la puissance et à l’accumulation, à cette mortifère compétition de tous contre tous - et de tous contre la Nature -, aux institutions politiques actuelles que nous n’estimons aucunement représentatives, donc pas à même de servir l’intérêt général, lequel nécessiterait par ailleurs des perspectives de 30-40 ans au minimum plutôt que la dictature du court terme électoral[14]et de la finance,
- replacer le pouvoir politique sous le contrôle de la société civile et même permettre à chaque citoyen-ne de prendre part à la gestion des affaires communes (démocratie réelle via démocraties directes à taille humaine – locales d’abord, régionales, nationales à défaut, cf. Suisse -, tirage au sort/rotation/non-cumul/révocabilité des fonctions et mandats, autogestion, …).
A cet égard, nous en appelons, à l’instar de ce qui se fait actuellement en Islande, à la formation d’une Assemblée constituante composée de simples citoyen-ne-s et chargée de rédiger une nouvelle Constitution, ainsi que, concernant le projet de nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes, ou tout grand projet d’aménagement comme en Ile-de-France le triangle de Gonesse, à un grand débat public ainsi qu’à une votation d’initiative citoyenne.
________________________________________
[1] Cf. annexe.
[2] Nous sommes conscients que les comportements ne seront pas modifiés de manière spontanée, mais avant que des contraintes bien plus douloureuses voire tragiques ne s’imposent à nous, nous proposons d’introduire de fortes incitations fiscales à des modes de vie plus soutenables, qui pourraient en outre encourager les producteurs et consommateurs à reconsidérer les produits qu’ils fabriquent et consomment.
[3] Objectifs : 1°taxer l’usage des RNR et la production de tous types de déchets et pas seulement du CO2 comme c’est prévu par la taxe carbone,
2° inciter à la création d’un « biotope » d’entreprises de telle sorte que les déchets d’une activité puissent servir de ressource à une autre activité : réduire les transports et la consommation d’énergie.
3°inciter également à une réflexion sur les produits réellement utiles et sur leurs impacts sur la nature.
[4] (1+500%)/(1+19,6%) hypothèse du calcul : produit fabriqué entièrement hors de France ; des taux plafonds encore plus importants pourraient être retenus.
[5] Déchets inclut tous les déchets : municipaux, industriels et gazeux (dont gaz à effet de serre, et donc oblige à importer du moins loin possible).
[6] Outre les niches fiscales qui sont pour la plupart anti-environnementales, les subventions publiques des activités polluantes devraient également être supprimées.
[7] On notera que contrairement à ce qu’indiquent ses détracteurs, ça n’est pas le « bio » qui est une mode, mais l’agriculture « chimique », qui n’a que 60 ans, alors que l’agriculture biologique a environ 12 000 ans.
[8] Sans mentionner les mesures sur le cannabis ou le mariage homosexuel, qui font diversion et masquent les véritables enjeux.
[9] Il est plus vendeur pour les médias dominants de parler de « décroissants » courant tout nus et vivant dans des cabanes au fond des bois, opposés au progrès et à la Culture et prônant le retour à la bougie voire à l’âge de pierre, plutôt que d’initier des réflexions sur des modes de vie harmonieux et pérennes ; c’est l’un des objectifs de nos différentes démarches.
[10] Le précédent président prétendait « aller chercher la croissance avec les dents », et l’actuel, face à la réalité complexe à laquelle il doit faire face, peut sauter sur sa chaise comme un cabri en disant croissance ! croissance ! croissance !, cela n'aboutira à rien et cela ne signifie rien, il faut prendre les choses comme elles sont, pour paraphraser le général de Gaulle.
[11] Une telle recherche, d’un autre siècle, revient non seulement à confondre la fin et les moyens, mais est désormais vaine en ce début de 3ème millénaire ; alors que M. Ayrault a déclaré le 29 novembre dernier à propos de l’opposition à Notre-Dame-des-Landes « on ne va tout de même pas tomber dans la décroissance ! », l’actuelle absence de « croissance », voire la récession (de facto une décroissance, mais subie celle-là) est le pire des scénarios dans le cadre de ce système reposant sur la recherche et l’existence d’une croissance du PIB, ce qui engendre inévitablement misère sociale et chômage de masse (voire bientôt le chaos ?), à l’opposé du modèle de société que nous défendons.
[12] Ca n’est pas nous mais le jury du concours d’entrée de l’ENA qui déplore lui-même cet état de fait !
[13] On notera par exemple que Gandhi était un objecteur de croissance.
[14] « La différence entre le politicien et l’homme d’Etat est la suivante : le premier pense à la prochaine élection, le second à la prochaine génération. » James Freeman Clarke.
"

On trouvera en pièce jointe le même texte assorti de graphiques.

Pour accéder au site d'Ile de France décroissance
Fichiers joints
Fiscalité.pdf [236.12 Kio]
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scripta manent
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Re: La course à la compétitivité ou Panurge au pouvoir

Messagepar causonsen » Jeu 14 Aoû 2014 13:28

Le Boston Consulting Group (BCG) a produit en avril 2014 une étude sur l'évolution de la compétitivité dans les 25 premiers pays exportateurs.

On y trouvera notamment des développements intéressants sur le contenu de la notion de compétitivité : BCG
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Re: La course à la compétitivité ou Panurge au pouvoir

Messagepar scripta manent » Ven 05 Sep 2014 12:03

" Le forum économique mondial (World Economic Forum) est une fondation à but non lucratif dont le siège est à Genève. Ce forum est connu pour sa réunion annuelle à Davos, en Suisse, qui réunit des dirigeants d’entreprise, des responsables politiques du monde entier ainsi que des intellectuels et des journalistes, afin de débattre des problèmes les plus urgents de la planète. (...). Il a été créé en 1971 par Klaus M. Schwab, professeur d’économie en Suisse. Parallèlement aux réunions, le forum publie un certain nombre de rapports économiques et implique ses membres dans différentes initiatives liées à des secteurs spécifiques. " (Wikipédia

Le Monde.fr a publié un article de synthèse sur le sujet.
Extrait :
" La France a réussi à maintenir son rang dans le classement mondial de la compétitivité, établi tous les ans par le Forum économique mondial (WEF) et publié mercredi 3 septembre à Genève. La France occupe en 2014-2015 le 23e rang de ce classement, comme en 2013-2014, alors qu'elle avait reculé auparavant durant quatre années consécutives. L'étude du WEF a été réalisée auprès de 15 000 chefs d'entreprises dans 144 pays et donne un classement mondial des pays les plus compétitifs, à partir d'une centaine d'indicateurs économiques. " (Le Monde.fr

Les résultats publiés tendraient à montrer que le " coût du travail " n'est pas le facteur dominant dans cette approche de la compétitivité. En effet, les 3 premiers du classement sont la Suisse, Singapour et les USA.
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Re: La course à la compétitivité ou Panurge au pouvoir

Messagepar causonsen » Jeu 11 Sep 2014 16:43

Un écho du Monde.fr de ce jour (11 septembre 2014) illustre la montée en puissance des " émergents " : extension du nombre des pays émergents ; montée en gamme de leur offre.

" Bouleversements dans les grandes sociétés des pays émergents
Les grandes entreprises des pays émergents sont en pleine mutation, à la fois plus diversifiées et confrontées à une crise de croissance, à en croire une étude parue jeudi. Sur les 100 grandes entreprises issues de pays émergents les plus performantes, moins de 50 % proviennent en 2014 des deux géants Inde et Chine, contre les deux tiers en 2006, selon le Boston Consulting Group, qui publie l'étude. Au total, le nombre de pays d'origine est passé de 10 à 18, illustrant une diversification géographique rapide. Alexandre Miannay, pour le Boston Consulting Group à Paris, souligne par ailleurs une diversification sectorielle : "On ne parle plus seulement d'industries lourdes ou liées au secteur des matières premières, mais de plus en plus de biens de consommation, que ce soit de la boulangerie industrielle, avec par exemple le mexicain Bimbo Group, ou des boissons alcoolisées, avec le sud-africain SABMiller".
"Nous regardons ces entreprises depuis 10 ans et le grand chambardement que nous attendions a lieu, nous avons de plus en plus de sociétés qui jouent dans la cour des grands", explique M. Miannay. "Il y a quelques années les moteurs étaient le faible coût de la main d'œuvre, les matières premières et les exportations. Mais deux nouveaux moteurs sont apparus : le marché intérieur, avec des classes moyennes qui grandissent, et des facteurs de compétitivité jusqu'ici propres aux multinationales des pays développés comme le développement de marques et l'innovation", poursuit-il.
"

Voilà qui pourrait donner à réfléchir à ceux qui voient le salut des " vieux dominants " dans le " haut de gamme ". Sous-entendu : nous avons la capacité de maintenir à notre profit une " exclusivité " de conception et production des biens à très forte valeur ajoutée. Aux chinois : les joujoux. Aux allemands : les machines-outils.
Bonne blague !

Pour accéder à l'étude du Boston Consulting Group : BCG
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