Le trilemme de la zone euro
Dans un article paru dans l’ « International Herald Tribune » du samedi 7 juillet 2012, Stephen Castle propose un nouveau mot-accroche (buzzword) à propos de la zone Euro: le « trilemme ».
La théorie du trilemme a été conçue il y a 12 ans par un économiste de l’université de Harvard, Dani Rodrik non pas en relation avec la crise européenne mais principalement à propos des crises économique des années 30 et 40. Selon cette théorie, sur les trois éléments que constituent : a) l’ intégration économique poussée, b) la démocratie et c) des états-nations indépendants, il est possible de réunir à un moment donné deux à la fois mais non pas les trois.
« Pour rester dans la zone euro des pays tels que la Grèce, l’Italie et l’Espagne sont obligés de plus en plus à céder leur autorité décisionnelle en adoptant des règles imposées par l’Allemagne » dit M. Rodrik . « Ceci crée des tensions démocratiques au niveau de la nation. Malheureusement, une austérité imposée de l’extérieur devient incompatible avec la démocratie ».
On admet généralement qu’il faut une intégration économique plus poussée pour sauver l’euro, ce qui introduit la perspective d’un rôle plus réduit de chaque état-nation dans la zone et la création d’une structure fédérale. Mais il est actuellement difficile pour les hommes politiques de se faire les avocats de « plus d’Europe » quand déjà les opinions publiques du sud éprouvent un ressentiment envers l’imposition de l’austerité par le nord et que la bureaucratie bruxelloise paraît éloignée des électeurs européens. Un officiel européen, parlant sous condition de garder l’anonymat, dit : « Quand les peuples européens se regardent dans la glace, ce ne sont pas les autorités de Bruxelles qu’ils voient, et vice-versa ».
Concernant la crise européenne actuelle M. Rodrik préconise un système démocratique transnational qui pourrait ressembler au fédéralisme américain. « Aux Etats-Unis le gouvernement fédéral ne renfloue pas les gouvernements des états fédérés, il s’occupe directement des résidents de la Floride ou la Californie parce que ils sont représentés par leurs députés et sénateurs ».
Parmi les tentatives pour aller dans ce sens l’article cite le rapport intérimaire publié en juin dernier d’un groupe de dix ministres des affaires étrangères européens présidé par le ministre allemand Guido Westerwelle. Parmi les mesures proposées on note : l’élection directe du Chef de l’exécutif européen-le Chef de la Commission (proposé par le Conseil et approuvé par un vote majoritaire du Parlement selon la procédure actuelle), la nomination d’un Ministre des finances pan-européen et la création d’un Parlement bicaméral avec le pouvoir d’introduire de la législation. L’article note également qu’un papier signé des 4 Présidents du Conseil, de la Commission, de la Banque centrale et de l’Eurogroupe également publié en juin dernier a conclu que « intégration et légitimité « devaient avancer parallèlement (sans préciser comment!). Il semblerait que parmi les propositions examinées lors de la rédaction de ce dernier rapport, celle de créer un parlement spécifique pour la zone euro, composé de membres du Parlement européen et de représentants des parlements des pays de la zone a finalement été écartée comme étant trop controversée. Cette idée semble néanmoins être dans l’air dans les capitales européennes.