Au-delà de ce débat ( certes indispensable ), on peut considérer que le mouvement commanditaire des attentats
du 13 novembre 2015 à Paris ( et autres ) est un NOUVEL AVATAR DU TOTALITARISME : ce qui est visé, c'est la pensée libre.
Tout d'abord il faudrait s'entendre sur les réels commanditaires de ces attentats? Daesh? Qui finance Daesh, comment est-il né dans une région contrôlée par les forces américaines, rappelons-nous, au nord de l'Irak.
Peut-être devrions nous réfléchir à la manière dont nos gouvernements, et ceux de nos alliés ont géré ce qu'on appellera pudiquement la "crise irakienne". Après la destruction de l'autorité publique, l'Etat irakien, et sa déstabilisation, le protectorat américain s'est appuyé sur des mouvements locaux, mafieux, pour contrôler les moyens de production, tout en n'assurant aucune des responsabilités étatiques, publiques. En permettant ainsi la mort de centaines de milliers de gens innocents. Un drôle de monde, ou l'on vient vous sauver d'une dictature, et au bout du compte, vous vous retrouvez avec des Daesh dans les pattes. Et un pays totalement ravagé.
Daesh est fort probablement l'un des multiples groupes avec lesquels "l'occident" a travaillé, collaboré, en Irak. C'est peut-être ça qui différencie ce début de 21ème siècle. Au 20ème siècle, les choses semblaient plus simple. Lorsqu'un dictateur arrivait en bout de course, on venait simplement donner un petit coup de pouce à son successeur. Ainsi les choses pouvaient continuer comme elles étaient. La stabilité permettait le développement du commerce libéral, des échanges, et de l'exploitation des matières premières, nécessaires à l'épanouissement de notre société civilisée. Et pour se donner bonne conscience, on consacrait quelques % de notre PIB à l'aide au développement.
Les choses étaient parfaitement ordonnées, et relativement simples à contrôler.
Aujourd'hui, il semblerait que le monde se soit compliqué. On le voit dans les pays d'Amérique du sud, il devient beaucoup plus difficile pour nos services secrets de continuer à soutenir des dictatures, sans prendre le risque de déstabiliser entièrement ces pays. Tout simplement parce que la région est devenue un marché de consommateurs, et pas uniquement un producteur de matières premières. Raison pour laquelle, il nous a fallu infléchir notre politique impérialiste. La démocratie étant devenue un plus grand facteur de stabilité, elle a probablement été perçue par les milieux financiers comme préférable au chaos qui aurait pu naître si l'on avait continué d'appliquer les anciennes recettes.
Par contre, dans les pays du proche-orient, la stabilité et l'ordre ne semble pas aussi nécessaire. Ces pays ne sont pas des marchés de consommateurs. Les troubles, et la destruction de l'Etat, ne semble pas atteindre aussi fortement les possibilités d'accéder aux ressources naturelles à bon prix. Au contraire même, il est probablement plus intéressant d'acheter le pétrole à Daesh, ou à un autre groupe du même type, plutôt qu'à un Etat, qui devrait en partie utiliser ses bénéfices pour le bien public. Aujourd'hui le pétrole vendu par Daesh, coule jusqu'en Europe. Et plus loin, Daesh et le régime d'Assad exploitent en cogestion certaines raffineries de gaz (voir le Financial times sur la question).
Nous n'avons manifestement qu'une vision très limitée de ce qu'est réellement Daesh, et des relations que notre système économique, et nos Etats entretiennent avec ces mouvements. Et pendant que nous gonflons les biceps, et que nous entrons en guerre contre Daesh, des milliers d'autres petits Daesh continuent d'oeuvrer, de racketer, de vendre et d'exploiter pour le plus grand profit de quelques-uns.
Ce n'est pas Daesh notre ennemi, et aucune guerre ne changera jamais ça. Notre ennemi, il est en nous. C'est notre dépendance totale à un système consumériste. Qui nous oblige à croître toujours plus, et à aller toujours plus loin dans l'exploitation de notre planète. La question essentielle, et celle qui fera que demain, des fous de Dieu ne viendront plus se faire exploser dans nos salles de divertissement, c'est de savoir comment nous allons faire évoluer notre société consumériste, pour qu'elle ne soit plus dépendante de l'exploitation du monde. Voilà bien le défi. Et même la nature, aujourd'hui, nous oblige à repenser notre société.
Ce qui est donc visé par ces attentats, c'est donc en effet, la pensée libre. Celle qui nous fait réfléchir aux causes et aux conséquences. Ne tombons pas dans ces discours haineux, gardons-nous de décisions prises sous l'emprise de l'émotion, et continuons notre travail de compréhension du monde, afin que puissent naître des solutions politiques à nos problèmes.