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" Ces entreprises plus fortes que les Etats "

" Ces entreprises plus fortes que les Etats "

Messagepar scripta manent » Dim 26 Mai 2013 15:32

Sous le titre explicite « Ces entreprises plus fortes que les Etats », le journal L’Expansion de mai 2013 fournit des informations qui illustrent bien la « soumission » actuelle de nos Etats au règne de la finance. Nous verrons cependant que la conclusion de l’article ne déroge pas à la ligne éditoriale du « magazine qui donne du sens à l’économie ».

Extraits :
« Dans son œuvre majeure, publiée au milieu du XVIème siècle, le grand philosophe anglais Thomas Hobbes représente l’Etat sous les traits du monstre marin, toujours prêt à déployer ses omnipotents tentacules pour asservir le commerce, la finance et l’industrie. Autres temps autres rapports de force. Aujourd’hui, l’ignoble serpent tortueux du Livre d’Isaïe s’est métamorphosé » en une indolente couleuvre et le Léviathan-Etat en Léviathan-SA …
Car ce sont désormais des sociétés anonymes mais présentes aux quatre coins du monde, des multinationales aux puissances financières démesurées qui défient les Etats, même les plus grands.
Quelques chiffres éclairent sur cette inversion des « valeurs » : début 2013, Apple pesait en bourse l’équivalent du budget de la France ou la somme des PIB roumain, hongrois, slovaque, croate et lituanien. Le seul chiffre d’affaires de la compagnie pétrolière anglo-néerlandaise Royal Dutch représente l’activité de tout le Royaume-Uni pendant deux mois et demi.
Sur le front de l’emploi - le nerf de la guerre en ces temps de chômage - les multinationales alignent d’impressionnantes armées. Fort de ses 2,1 millions de salariés, le plus gros employeur privé du monde, Wal Mart, fait jeu égal avec l’armée populaire chinoise (2,3 millions). Nul besoin en fait de former de telles troupes pour faire plier le souverain. Les 20.000 métallos français employés par ArcelorMittal autorisent le patron à quelques bravades et promesses non tenues à l’endroit des gouvernements Fillon et Ayrault.
(…)
En 2011, Trois chercheurs de l’école polytechnique fédérale de Zürich publient une étude « explosive » sur les participations de 43.000 sociétés transnationales : ils révèlent ainsi que 737 firmes contrôlent à elles seules 80 % du total. Or ces entreprises tentaculaires dépensent des sommes folles en lobbying pour tenter d’imposer leurs normes et d’infléchir la réglementation. Quitte à prendre elles-mêmes le stylo pour écrire leurs propres lois. Et quand un Etat un brin récalcitrant bombe le torse pour imposer de nouvelles règles, elles n’hésitent pas à porter leurs différends devant la justice. Une étude de l’ONG belge Corporate Europe Observatory dénombre quelques 450 cas d’arbitrage entre un Etat et une entreprise dans le monde en 2011, contre seulement 38 en 1996. Des « attaques » permises par les clauses dites « investisseurs-Etats » inscrites dans la plupart des accords de libre-échange entre pays, et qui autorisent une entreprise à poursuivre en justice un Etat dès lors qu’elle juge que son investissement est floué par une modification de la loi. Ainsi, le géant suédois de l’énergie Vattenfall, un des principaux gestionnaires du parc nucléaire outre-Rhin, exige aujourd’hui 3,5 milliards d’euros de l’Etat allemand après sa décision de sortir à terme de l’atome …
Quel affront ! Mais à qui la faute ? (…)
Aux Etats surtout. Ils ont organisé leur propre abdication
».

Quelques commentaires :

En ces temps de bulle spéculative et de gonflette boursière, il est aventureux de prendre la valorisation en bourse comme indicateur de la puissance d’une société. Pour prendre le cas cité par cet article, la valorisation d’Apple a effectivement dépassé les 600 Mds de dollars, mais son chiffre d’affaires, plus représentatif de la force de frappe du groupe, est, lui, de l’ordre de 100 Mds de dollars.
On pourrait aussi citer le cas Facebook dont l’introduction en bourse a relevé de la frénésie spéculative.

C’est à juste titre que L’Expansion rappelle que les Etats ont organisé leur propre abdication.
Cela est à la fois consternant et rassurant car, les Etats ont aussi le pouvoir de reprendre les commandes.
D’ailleurs, dans l’article, Jean-Louis Beffa, ancien Président de Saint-Gobain signale notamment que « présenté comme hyperpuissant, Apple ne pèse rien en Chine, parce que Pékin a dit non ».

A lire tout cela, on serait tenté de croire que L’Expansion a « viré à gauche ».
Il faut attendre la conclusion pour s’apercevoir qu’il n’en est évidemment rien.
Jean-Louis Beffa y est à nouveau cité, mais pour « redresser le tir » : « Organiser une association d’Etats contre les multinationales de servirait pas à grand-chose. Il faut accepter la compétition entre Etats, mais chaque pays doit avancer avec ses champions nationaux en guise de fantassins ». Curieuse formule. Plutôt que des « fantassins », les « champions nationaux » ne seraient-ils pas plutôt des généraux qui envoient leurs troupes au front où les salariés/fantassins, paient le prix de cette « guerre économique » ?
Face aux outrances ultralibérales dont les médias se font l’écho, L’Expansion, fort habilement, fait avec cet article « la part du feu ». Le titre est accrocheur et abondamment illustré par le corps du texte mais la conclusion est dans le droit fil de la vulgate ultralibérale : « Paradoxalement, le meilleur moyen pour les Etats de dompter les multinationales serait de s’en rapprocher. » Ben voyons …

Pour accéder au site de « Corporate Europe Observatory » (CEO) : http://corporateeurope.org/
L’objectif déclaré de CEO est « d’exposer le pouvoir du lobbying d’entreprise au sein de l’Union européenne ».

Voir aussi : De l'Etat souverain à l'Etat soumis
scripta manent
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Re: " Ces entreprises plus fortes que les Etats "

Messagepar scripta manent » Mar 05 Mai 2015 21:59

Sous le titre " Les multinationales battent pavillon à l'Expo universelle de Milan ", Le Monde.fr du 4 mai 2015 nous livre une autre illustration, puissamment symbolique, du sujet : les entreprises plus fortes que les Etats. A l'exposition universelle de Milan, les pavillons des multinationales voisinent désormais avec ceux des Etats.

Extraits :
" Les « boutiques nationales » voisinent désormais avec des marques qui, elles aussi, tentent de se distinguer moins par leurs atours architecturaux que par la présence de leurs logos.
Légèrement en retrait de l’axe majeur, non loin de l’extrémité Est du site, mentionné parmi les quelques lieux de « pause pour la famille » sur le plan officiel remis à chaque visiteur, McDonald’s, l’un des sponsors de la manifestation, s’est glissé entre les pavillons du Qatar et du Turkménistan. Encore plus discret, Coca-Cola a posé son édifice très corporate, grand comme quatre courts de tennis, dans un des périmètres les plus tranquilles de l’Expo en surplomb du jardin bio-Mediterraneo.
(...)
le pavillon de l’Italie n’a, quant à lui, pas hésité à faire étroitement voisiner dans un même ensemble les vitrines de ses régions et celles d’enseignes nationales réputées (Granarolo, San Pellegrino, Martini & Rossi, Lavazza…) non sans créer une certaine confusion pour le passant inattentif
. "

Pour accéder à l'ensemble de l'article : Le Monde.fr
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