Les négociations entre la Commission et le Conseil, d'une part, et le Parlement européen, d'autre part, au sujet du budget 2013 de l'Union ont fait ressortir des désaccords persistants.
Schématiquement, on peut dire que la Commission est sous influence des pays favorables à un plafonnement, voire une réduction du budget communautaire, alors que le Parlement défend une position fondée sur la nécessité de ne pas mettre en péril certains programmes essentiels et, plus généralement, de conserver une dynamique au projet européen.
Avec la quasi disparition des droits de douane à ses frontières, l'UE a vu disparaître l'essentiel de ses ressources propres. Elle dépend donc désormais massivement de la contribution financière de chaque Etat membre. Cette situation a permis au syndrome du " I want my money back ", initié par Margaret Thatcher, de se propager, au détriment du principe de solidarité autour d'un projet commun.
Des communiqués de presse de la Commission des budgets du Parlement européen font le point sur ce qui commence à ressembler à une situation de blocage :
12 novembre 2012 :
" Suspension des négociations sur le budget de l'UE en raison d'un différend concernant le paiement des factures de cette année.
Les négociations sur le budget de l'Union européenne pour l'année prochaine ont été suspendues vendredi soir en raison d'un désaccord entre le Parlement et le Conseil à propos des éventuelles solutions destinées à contrer le manque de fonds restants
dans le budget 2012. Le Parlement et le Conseil ont jusqu'à mardi minuit pour trouver un accord.
"Les différences entre les positions du Conseil et du Parlement étaient trop importantes pour poursuivre les négociations cette nuit", a regretté le principal négociateur pour le Parlement, Alain Lamassoure (PPE, FR). Il a émis le voeu de disposer d'une base suffisante pour poursuivre les discussions mardi, dernier jour officiel de la période de conciliation.
Pas de fonds pour payer les factures en 2012
Le budget de 2013 n'a pas été le seul sujet abordé. Le Parlement a également insisté pour trouver une solution aux insuffisances budgétaires concernant les paiements en 2012. Il s'agit de factures, qui ne sont pas contestées, présentées par les autorités des États membres qui gèrent les fonds européens et pour des crédits gérés par la Commission européenne.
Le Parlement craint que ces factures soient repoussées en 2013, ce qui menacerait la mise en oeuvre des politiques européennes l'an prochain et contredirait la déclaration signée par les États membres en novembre dernier. C'est pour cette raison que le Parlement a soutenu la proposition de la Commission d'ajouter 8,9 milliards d'€ au budget 2012, en vue de permettre à la Commission de rembourser aux autorités des États membres les fonds qu'elles ont avancés aux bénéficiaires de leur pays. Une minorité de blocage d'États membres a insisté sur le fait que la Commission devait rembourser cet argent à partir du budget actuel, mais le Parlement et le commissaire aux budgets, M. Lewandowski, estiment que le peu de fonds restants pour 2012 ne pourraient couvrir, de loin, ces paiements.
Victimes de tremblements de terre et Erasmus
Le seul résultat de la réunion de vendredi a été une déclaration de volonté politique en vue de financer le "soutien à la solidarité" pour les victimes de tremblements de terre en Italie (670 millions d'€), mais sans accord sur la manière de le financer. Parmi les programmes pour lesquels une solution est nécessaire figurent la formation tout
au long de la vie (notamment Erasmus), le développement rural, le Fonds social européen, le Fonds de cohésion, et le 7e programme-cadre pour la recherche et le développement.
Les pays les plus touchés par l'impasse concernant les paiements de 2012 sont l'Italie, l'Espagne, l'Allemagne, la Grèce, la République tchèque et la Bulgarie. Ces pays ont tous préfinancé les dépenses européennes par des montants allant de 400 millions d'€ à 1,9 milliard d'€.
Prochaines étapes
Si aucun accord n'est conclu d'ici 21 jours, les négociations trilatérales se poursuivront et définiront la base d'un nouveau projet de budget pour 2013, qui sera présenté à la Commission. Ce projet devra être approuvé par la commission parlementaire des budgets et par le Parlement dans son ensemble en plénière, ainsi que par le Conseil, avant fin 2012. "
30 octobre 2012
" Les principaux négociateurs du Parlement pour le budget à long terme de l'UE pour 2014-2020 ont fait part de leur consternation par rapport à la proposition de la présidence chypriote concernant le cadre financier pluriannuel (CFP) présenté ce mardi. Les députés ont principalement critiqué une réduction proposée de 50 milliards d'euros par rapport à la proposition initiale de la Commission européenne présentée il y a 16 mois.
Un très mauvais signal
"Nous nous opposons vivement à cette proposition car elle menacera inévitablement l'avenir de plusieurs politiques et programmes clés. Nous estimons qu'elle entravera le rôle du budget de l'UE qui sert d'instrument pour générer de la croissance économique et des emplois", ont déclaré ce mardi les rapporteurs Reimer Böge (PPE, DE) et Ivailo Kalfin (S&D, BG). Ils sont d'avis que la proposition de la présidence "envoie un très mauvais signal en termes de priorités politiques, étant donné que les coupes les plus importantes sont précisément faites dans des domaines politiques considérés comme indispensables pour favoriser la compétitivité, la croissance et l'emploi".
Dans une résolution datant du 23 octobre, adoptée à une écrasante majorité, le Parlement européen avait déjà déclaré que même la proposition de la Commission, en faveur d'un gel des plafonds du budget au niveau des plafonds de 2013, ne suffirait pas à financer les priorités politiques actuelles liées à la stratégie "Europe 2020", qui comprend de nouvelles missions conférées par le traité de Lisbonne, sans parler d'événements imprévus.
Profondes inquiétudes par rapport au niveau des dépenses, de la flexibilité et des ressources propres
Les rapporteurs regrettent profondément que les principaux points de la position du Parlement, répétés à maintes reprises, n'aient pas été pris en compte par la présidence du Conseil. Parmi ces éléments figurent non seulement le niveau des dépenses mais également des réformes sur la manière dont le budget est constitué, en l'occurrence le système des "ressources propres". Le Parlement souligne que le Conseil européen, à savoir les chefs de gouvernement de l'UE, ont conclu un accord politique sur une réforme de grande envergure relative au financement du budget européen "en vue de le rendre plus équitable, plus transparent, plus stable et plus responsable".
Alors qu'elle met l'accent de manière positive sur la qualité des dépenses, la proposition actuelle de la présidence chypriote réduit parallèlement la flexibilité des transferts de fonds entre et dans les rubriques politiques du budget. "Réagir aux événements imprévus et aux circonstances politiques, en constante évolution, serait encore plus difficile", craignent les rapporteurs.
Ils soulignent que le CFP fixe des montants maximums par rubrique politique (plafonds) et qu'en fait, les budgets annuels de l'UE ont toujours été fixés bien en dessous de ces plafonds.
La proposition contredit le "pacte pour la croissance et l’emploi" du Conseil européen
Si les coupes devenaient réalité, elles impliqueraient qu'un programme de l'ampleur du mécanisme pour l'interconnexion en Europe, à savoir le principal investissement de l'UE en vue d'améliorer les réseaux européens de transports, de l'énergie et numérique, ne pourrait jamais être mis en œuvre pendant la prochaine période.
Les coupes proposées pourront menacer le programme de recherche Horizon 2020, considéré comme essentiel pour stimuler l'innovation, la compétitivité, la croissance et l'emploi. Le programme de bourses d'étude Erasmus souffrirait également, et des programmes scientifiques à grand échelle, comme ITER (fusion nucléaire), GMES et Galileo, seraient en outre menacés. "Nous estimons que cette proposition est incompatible avec les engagements politiques pris par le Conseil européen, notamment le récent 'pacte pour la croissance et l'emploi' dont la mise en œuvre repose fortement sur le budget de l'UE", ont déclaré MM. Böge et Kalfin.
Prochaines étapes
Désormais, l'équipe de négociateurs du PE étudiera en profondeur le nouveau "cadre de négociation" présenté par la présidence chypriote, mais conseillera au PE d'agir conformément à ses positions précédentes. Le Conseil européen sera informé des points de vue du Parlement avant son sommet extraordinaire des 22 et 23 novembre. Toute décision qui ne tient pas compte de la position du Parlement pourrait entraîner le veto du PE. "