Le jour même de l'ouverture de la conférence sociale (7 juillet 2014), Médiapart titre : "Les milliards d'allègements de charges ont un impact très limité sur l'emploi".
Extraits :
" Les 41 milliards de mesures de réduction du coût du travail consentis aux entreprises, regroupés dans le pacte de responsabilité, vont encore occuper le devant de la scène sociale cette semaine (...). Le pacte de responsabilité sera aussi l'un des sujets les plus ardus de la conférence sociale (...).
Les syndicats doivent négocier l'impossible en deux jours, avec un patronat aux abois qui refuse de chiffrer par écrit tout engagement : les contreparties en matière d'emploi et d'investissement à ces allégements fiscaux et sociaux massifs, sur le dos de la Sécurité sociale, des ménages, des collectivités locales, astreints à un plan d'économies de 50 milliards d'euros. (...)
À une semaine près, un rapport particulièrement instructif et complet aurait pu tomber à pic avec la conférence sociale. Il aurait permis d'orienter et de concentrer les discussions sur l'essentiel : l'efficacité limitée et très contestable de ces cadeaux fiscaux et subventions à l'embauche pour faire reculer le chômage. C'est le rapport de la mission menée par le Sénat à l'initiative du groupe communiste et apparentés sur la réalité de l'impact réel des exonérations de cotisations sociales sur l'emploi. Depuis quatre mois, cette mission, passée complètement inaperçue, présidée par l’UMP Charles Guéné, auditionne représentants des pouvoirs publics, experts et économistes de tous bords, organisations patronales, syndicales, sur le sujet d'actualité le plus brûlant du moment.
Les conclusions du rapport qui sera rendu public d'ici la mi-juillet sont sans appel, selon Michelle Demessine, sénatrice communiste du Nord et rapporteure de la mission. « L'efficacité des exonérations de charges en matière d'emploi n'est absolument pas démontrée. Plus on entre dans le détail, plus on doute et constate les dérives. Cette importante dépense publique est bâtie uniquement sur le dogme du coût du travail. Elle nécessite une réelle évaluation, qui fait défaut aujourd'hui, malgré l'abondante littérature sur le sujet et l'empilement des rapports. On ne sait pas faire la différence entre les emplois créés, sauvegardés, on ne sait pas donner de fourchette plus précise que de parler de 70 000 à 800 000 emplois créés ! On ne sait pas cibler les secteurs prioritaires. Ainsi, des secteurs non exposés à la compétitivité, comme la grande distribution, en bénéficient. Plus grave, on tire les salaires vers le bas. Est-ce que les salariés qui n’ont jamais vu leurs bas salaires augmenter savent que c’est à cause de ces exonérations ? » (...)
La Cour des comptes pointait les limites de la stratégie dès 2006. Elle soulignait notamment que les allègements bénéficiaient, pour l’essentiel, à des activités tertiaires, notamment la grande distribution, où « les exonérations de charges sur les bas salaires n’ont pas impacté significativement la politique de recrutement ». Les industries manufacturières, directement exposées à la concurrence internationale et au risque de délocalisation, ont quant à elles peu profité de ces exonérations.
Au total, la Cour estimait que « les allègements représentent aujourd’hui un coût trop élevé », pour une « efficacité quantitative [qui] reste trop incertaine ».
En 2009, la Cour des comptes faisait un nouveau rapport. Pour relever que les nombreux dispositifs d’allègement des charges sociales étaient « insuffisamment évalués en dépit de la charge financière croissante qu’ils représentaient pour les finances publiques (27,8 Md€ en 2007, soit 1,5 % du PIB)». S’agissant des allègements généraux sur les bas salaires, leur efficacité sur l’emploi était « trop incertaine pour ne pas amener à reconsidérer leur ampleur, voire leur pérennité ». Quant aux allègements ciblés sur des territoires ou des secteurs d’activité, « leur manque de lisibilité et leur impact limité sur l’emploi justifiaient un réexamen des différents mécanismes ». (...)
En deux décennies, ce sont plus de 370 milliards d'euros de baisses de charges qui auront été offerts aux entreprises sans aucune contrepartie ni aucun moyen de vérification que les fonds ont bien servi à créer ou sauvegarder de l'emploi, à investir, à former ses salariés. "
Oui, mais est-ce si simple ? Quand des moyens de vérification sont mis en place, on crie à l'usine à gaz ...
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