On va finir par en avoir par dessus la tête des débats sur les questions d'évasion - pardon, d'optimisation - fiscale de LVMH, Bernard Arnault et consorts.
Mais ou bien on traite un sujet sérieusement ou bien on ne le traite pas. Or, il se trouve que
Le Monde.fr a publié, le 3 février 2013, sous le titre "
LVMH esquive une bonne partie de l'impôt sur les sociétés en Belgique ", un article qui a le mérite d'apporter des précisions techniques sur le dossier.
Quant au
Canard enchaîné du 6 février, il en remet également une couche, sous le titre "
Comment Arnault a obtenu un taux de pauvre pour la succession la plus riche de France ".
Extraits du Monde.fr :
"
Pilinvest, la société belge à portefeuille établie à Bruxelles par Bernard Arnault, le patron de LVMH, a déposé il y a quelques jours – avec beaucoup de retard – ses derniers comptes annuels à la Banque nationale de Belgique. Ils indiquent qu'au cours des années 2010 et 2011 cette société qui contrôle une part importante du capital du groupe LVMH – 64,26 % au total selon la banque de données Graydon – a réalisé 85,7 millions d'euros de bénéfices. Mais elle n'a pas payé un centime d'impôts dans sa patrie d'accueil, le pays dont M. Arnault espère toujours acquérir la nationalité.
Une situation parfaitement légale, souligne l'entourage du patron de LVMH. Il n'est pas démenti : Pilinvest a bénéficié des largesses de la législation belge. Celle-ci autorise notamment la déduction de 95 % du montant total des dividendes versés à une société holding par les sociétés dont elle détient des parts. Et les plus-values d'une telle entreprise sont également exemptes d'impôts.
Le quotidien économique De Tijd (...) conclut que la Belgique est réellement un paradis fiscal pour quelque 20 % des 100 plus grandes sociétés au monde. Au total, le hit parade établi par le journal indique que les 25 premières sociétés de ce classement disposent, en Belgique, de 336 milliards de fonds propres, sur lesquels elles acquittent ensemble 180 millions d'euros d'impôts, réalisant un bénéfice global estimé de 25,4 milliards. Le volume d'emplois créés grâce à ce mécanisme est de... 760 unités. (...)
Le groupe LVMH est donc en bonne compagnie et bénéficie lui aussi, à l'évidence, des mécanismes belges permettant d'esquiver au moins une partie de l'impôt des sociétés. "
Pour accéder au texte complet de l'article :
LVMH esquive une bonne partie de l'impôt sur les sociétés en BelgiqueLe Canard enchaîné, de son côté, apporte des précisions sur la société Pilinvest, créée en Belgique en 2005 pour "
recueillir les actions de Groupe Arnault, la holding qui contrôle toutes ses sociétés ". Chose à peu près faite aujourd'hui puisque Bernard Arnault y a progressivement transféré 90 % de ses titres. Le Canard détaille les modalités de ces opérations ainsi que des donations opérées par Bernard Arnault à ses enfants. Au total, en exploitant au mieux les dispositions fiscales françaises et belges, Bernard Arnault a ainsi réussi à réduire la ponction fiscale sur ces transferts à 6,5 % de la valeur actuelle du groupe (30 milliards d'euros), en lieu et place des 45 % de droits de succession qui se profilaient à l'horizon.
Pour des raisons techniques, ce montage ne porte à ce jour que sur la moitié des titres et "
Bernard Arnault a fait savoir qu'il paierait rubis sur l'ongle, et en France, les droits de donation à ses enfants des titres qu'il possède encore à son nom chez Pilinvest. " Chiche ?
Le Canard enchaîné fait cependant observer que "
tout est prêt pour que cette donation soit effectuée en Belgique, Dans ce cas Arnault ne règlera alors, au pire, que 3 % de taxes. " Affaire à suivre ...
Une curiosité supplémentaire sur ce dossier : "
La savante opération financière a été mise au point alors que Thierry Breton était ministre des Finances. (...)
Ce même Thierry Breton est aujourd'hui responsable de la fondation d'Arnault en Belgique, clé de voûte de l'opération. (Proctinvest) ". Honni soit qui mal y pense.
Pour reprendre une expression chère à notre Autorité des marchés financiers (AMF) : tout cela est "
limite mais légal " ?